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Trafiquant séquestré à Aulnay : la défense minimise le rôle des deux hommes clés

Jusqu’à 18 ans de réclusion ont été requis contre des trafiquants après la séquestration d’un convoyeur qui n’avait jamais livré les 100 kg de drogue qu’il transportait depuis l’Espagne. Le verdict sera rendu ce jeudi.

« Il est loin le temps de l’Espagne, des casinos et des filles ». Ainsi Me Beryl Brown amorce sa plaidoirie mercredi devant la cour d’assises de Bobigny. Son client, Mohamed C., 36 ans, est accusé d’enlèvement et de séquestration en bande organisée, ainsi que d’actes de tortures et de barbarie avec la complicité de sept autres prévenus. Ces trafiquants expérimentés sont jugés pendant deux semaines lors d’un procès hors norme.

Le 28 septembre 2014, Mohamed aurait orchestré l’enlèvement, les séances de torture pour faire avouer à René* où étaient passés 100 kg de drogue que celui-ci devait acheminer depuis le sud de l’Espagne jusqu’en Seine-Saint-Denis. Arrivé dans le 93, le chauffeur se serait fait braquer par des inconnus. 300 000 € évaporés, qui laissaient espérer le double à la revente. Ses commanditaires n’ont jamais cru à sa version des faits.

Blotti dans un coin du box, Mohamed C. se ferait presque oublier. Cheveux poivre et sel, regard creusé, il n’est plus le trafiquant flambeur sur la Costa del Sol. Mais l’ombre de lui-même.

Trente heures d’atrocité

Me Brown tente de faire tomber un à un les arguments de l’accusation. L’enlèvement, par trois hommes cagoulés qui poussent René et son acolyte Maxime* dans une fourgonnette ? « Mon client était encore en Espagne ». Mohamed C. leur demande de se rendre à un rendez-vous. « Il a facilité les choses. Nous sommes plus dans la complicité », martèle Me Brown.

La séquestration ? « Mohamed n’arrive qu’à minuit. C’est là que les violences cessent. Il enlève les menottes de Maxime et l’embrasse sur le front ». Il s’emploie à calmer les esprits, d’après son avocate.

Les deux captifs viennent de subir pendant 30 heures les pires atrocités. Tout le monde convient que Mohamed C. n’a jamais levé la main sur les victimes. Mais pendant le supplice de la noyade, où on maintient la tête de René dans une baignoire, il n’a pas bougé le petit doigt. « Il est arrivé dans une situation qui avait dérapé. Il a fait ce qu’il a pu », plaide Me Brown qui implore la cour de ne pas aller au-delà de 7 ans. Alors que 10 à 12 ans avaient été requis par l’avocate générale, Marie-Claire Noiriel.

« Il est impossible de reconnaître une voix avec certitude »

Mohamed K. est l’autre personnage central du dossier. Treize à 15 ans de réclusion criminelle ont été requis contre lui. L’homme au passé tumultueux était détenu au début de l’instruction pour avoir fourni les clés de l’appartement qui a servi à la séquestration. Au cours du procès, René reconnaît sa voix et Mohamed K est alors désigné comme étant le « tortionnaire » des deux suppliciés.

Dans une plaidoirie enflammée, son avocat Jean-Christophe Tymoczko a émis des doutes quant à la reconnaissance vocale : « Il est impossible de reconnaître une voix avec certitude contrairement aux empreintes digitales ou à l’ADN ». S’adressant aux jurés l’avocat a conclu ainsi : « Vous pouvez l’acquitter en tout cas ne le condamnez pas pour ce qu’il n’a pas commis ». Le verdict sera rendu ce jeudi.

*Les prénoms ont été modifiés.

Source : Le Parisien